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19/07/2009

Semaine d'escalade

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Semaine Oisans Queyras  Oisans Queyras 2009 096.jpg

 

Cette année pour la deuxième fois nous décidons de faire une semaine d'escalade difficile. Mai l'âge aidant le plaisir étant notre première motivation et non la trouille de la chute accrochés à des grattons, nous partons avec un guide. Cette année encore le temps sera favorable, un peu moins que l'an dernier . En effet le temps orageux dans l'après-midi ne nous permettra pas d'envisager des voies de très grande ampleur. Nous ferons cependant quatre belles escalades entre deux cents et quatre cents mètres, cotées aux environs de TD( très difficile dans le jargon alpinistique), précédées d'un petit échauffement d'une soirée sur le Quiquillon d'Orpierre.

 

C'est avec beaucoup de plaisir que je me retrouve à Orpierre dans ce magnifique petit village des Hautes Alpes, chargé d'histoire. En effet il y a plusieurs siècles il se trouvait sur un axe important, maintenant totalement secondaire. Demain nous devons nous rendre au refuge de l'Olan où nous attend notre camarade et guide.

 

La remontée de la vallée du Valgaudemar en voiture se fait religieusement. Nous pénétrons dans un sanctuaire. L'Oisans et ses montagnes dégagent une atmosphère bien particulière. De grands versants dépouillés tombant dans des vallées profondes. Des sommets à l'aspect austère et sauvage dominent du haut de leurs pentes neigeuses et rocailleuses. Le roi de la vallée, l'Olan, trône du haut de ses trois mille six cents  et quelques mètres. Nous faisons un arrêt à la Chapelle, joli village, qui à cette époque, fin juin est presque désert. Nous mangeons rapidement, en particuliers les tourtons, des spécialités locales, beignets fourrés. Notre choix se porte sur ceux aux épinards et à la framboise, un régal. Nous en profitons pour envoyer quelques cartes postales, aux enveloppes magnifiques des edelweiss ou de grosses marmottes.

 

Nous attaquons vers les quatorze heures la montée au refuge de l'Olan. Des fleurs partout nous accompagnent une grande partie de Oisans Queyras 2009 014.jpgla montée, en particulier de superbes lys martagons à la couleur orange. Le printemps ou le tout début de l'été, c'est vraiment le moment idéal pour se promener en montagne. A plusieurs reprises nous passons à proximité de magnifiques cascades. Que cette montée est longue. Le chemin vers l'amont ne se découvre jamais sur une grande distance du fait des ruptures de pente. Le refuge n'apparait qu'au dernier moment. Notre guide, Christophe nous attend. Ce soir il y a peu de monde et le gardien nous attribue un grand dortoir pour nous seuls. Un vrai plaisir que de venir en refuge dans ces conditions.

 

Lever pas trop matinal, car ce soir nous restons ici. De plus le temps sera assez stable pour la journée, les orages possibles et très localisés ne devraient pas se manifester avant la soirée. L'objectif de la journée est une escalade de 370 mètres cotée TD inf, qui se situe Oisans Queyras 2009 084.jpgau beau milieu de la Rouye, belle paroi orientée à l'ouest qui se dresse au-dessus du refuge. Une heure de marche d'approche en empruntant la voie normale de la pointe du Vallon. Cette montée nécessite les crampons sur une neige assez raide et dure. Comme généralement les derniers mètres avant le rocher sont plus pentus , tantôt neigeux et tantôt rocheux. Sur le rocher en crampons sans être encore encordés, bien que la difficulté ne soit pas importante, nécessite de l'attention. Et notre guide nous connaissant bien , considère que nous n'avons pas besoin de corde. Le rituel de la préparation à l'encordement terminé, la première longueur est attaquée par Christophe. Le rocher est un peu humide mais il est tellement adhérent que cela n'augmente pas vraiment la difficulté. Le toucher de ce joli granit de l'Oisans au grain franc et très adhérent est un véritable plaisir. La paroi est quasiment verticale sur les deux premières longueurs, puis sur une soixantaine de mètres l'inclinaison est moindre sur un terrain beaucoup plus facile. Puis la verticalité redonne tout son attrait à l'escalade sur quelques trois cents mètres. Ce n'est jamais facile, mais toujours une possibilité de Oisans Queyras 2009 045.jpgmettre un pied en adhérence ou sur un gratton et les doigts peuvent généralement se nicher sur une petite réglette bien franche. Dans certains passages, toutefois, il est nécessaire de tirer sur des prises indirectes en opposition, c'est un peu athlétique. La difficulté raisonnable, entre quatre sup et six a, laisse tout loisir au plaisir de s'exprimer pleinement. L'escalade, c'est un peu comme le vélo, la technique reste, en particulier la technique de pied, la plus importante pour soulager l'effort des bras, ce qui est d'autant plus important, lorsqu'on n'a plus trop d'entraînement. On a vraiment le sentiment de se trouver en pleine montagne. Le cirque de l'Olan est magnifique, et l'ambiance est d'autant plus impressionnante que Oisans Queyras 2009 053.jpgquelques nuages commencent à envahir l'espace à nos pieds. Tout de suite la montagne prend un air plus austère et plus mystérieux. Être pendu au-dessus du vide avec les nuages sous les pieds me rappelle les grandes escalades que je faisais il y a bien longtemps et j'ai l'impression de rajeunir. Sans incident nous arrivons au sommet. Nous sommes seuls, comme quoi même en France on peut encore se trouver dans des montagnes désertes. Assis au sommet nous profitons de ce spectacle sublime, des parois qui jouent à cache- cache avec les nuages. L'effet loupe du soleil nous distille une douce chaleur. Vient le moment, après une petite demie-heure de contemplation, d'envoyer la corde pour le premier rappel. Moment toujours impressionnant lorsqu'on se jette dans un vide de quatre cents mètres suspendu à une simple corde. Mais la technique est bien rodée et même à trois nous ne mettrons pas longtemps pour retrouver le pied de la paroi. Notre guide qui nous prend pour des bons, ne trouve pas utile de mettre un rappel le long du socle suspendu de soixante mètres et donc me voilà lancé dans une déescalade sans assurance. Bien que ce ne soit pas difficile techniquement, les prises de main sont fuyantes et parfois des mottes de terre peuvent rendre les chaussons d'escalade gras avec des conséquences funestes, en effet la chute ne pardonnerait pas . Mais il avait raison nous maitrisons sans incident ce passage sans assurance, ça donne même un peu de piquant à une escalade certes difficile mais dénuée de danger pour le second de cordée . Encore un rappel de cinquante mètres et nous touchons la neige. Au cours du retour au refuge une averse orageuse nous rafraîchit. Soirée agréable, toujours peu de monde, le gardien nous raconte la vie du refuge et sa passion pour le para-pente. Il faut dire que l'implantation du refuge est idéale. En effet on voit le village 1200 mètres plus bas et d'un coup d'aile on peut y être. Mais comme toujours il faut faire très attention à l'aérologie locale.

 

Après une bonne nuit, lever matinal, non que l'escalade sera longue, mais nous descendrons dans la foulée dans la vallée. L'objectif pour ce matin se trouve juste au-dessus du pas de l'Olan. Belle paroi granitique bien verticale s'élevant d'un jet de deux cents mètres. Oisans Queyras 2009 085.jpgAprès une marche d'approche d'une heure nous attaquons ce joli rocher. L'escalade est athlétique, parfois surplombante. De jolies fleurs colorent les fissures, certaines d'un bleu lumineux. De temps à autre de belles touffes de genépi bien mûres sont tentantes, et un peu à la manière de l'oncle Picsou qui voit danser les dollars, nous voyons danser les bouteilles bien remplies de cette herbe miraculeuse!!!. Sur notre gauche un panorama magnifique s'étend jusqu'au Dévoluy, et nous pouvons en admirer tous les sommets. Sans incident nous gravissons cette jolie voie, cotée très difficile et en quatre rappels de 50 mètre nous nous retrouvons au pied. Nous entamons la descente vers le refuge et rapidement vers la vallée. Il fait chaud et cela me semble long. Surtout que j'ai commis la faute de garder mes grosses chaussures et qu'une ampoule commence à me titiller le talon droit. Il y a très longtemps que ce genre de maux ne m'était plus arrivé. A notre arrivée à la voiture, la pluie nous accueille, elle est drue mais elle arrive un peu tard, nous sommes au sec. Ce vallon de l'Olan, nous y avons passé deux jours sans voir grand monde. Tout à loisir j'ai pu dans le calme penser à mes expériences passées, en particulier la face nord que j'ai gravie il y a maintenant trente ans. C'était une belle face terrain haute montagne de 1100 mètres. Cette escalade m'a laissé des souvenirs forts par la sauvagerie de cette face, qui était très peu équipée. Il y a quelques années elle s'est écroulée et la voie Devies Gervasutti ne doit plus exister,même les voies d'escalade meurent. A côté de la voiture un gros rocher sur lequel sont fixées des plaques commémoratives, en particulier en souvenir de cordées tombées à l'Olan. Si attrayante que soit l'ascension de ces belles montagnes, ces plaques nous rappellent que ce sport reste dangereux.

 

Demain et les jours à venir l'activité orageuse devrait se développer. Nous avons à notre programme deux ascensions du côté du Viso. Il sera toujours temps demain soir au col Agnel de faire le point.

 

Nous arrivons au refuge Agnel qui a la particularité d'être au bord de la route. Le temps ne semble pas très beau, orage de milieu d'après-midi. Sur le côté italien dans le coin du Viso ça accroche sérieusement. Nous décidons donc de rester sur le versant français et de grimper dans les environs. Certes les voies sont de moindre développement, mais il y a quand même de quoi s'amuser. Nous montons au col Agnel. Il y passe beaucoup de monde, touristes en voiture, motards beaucoup d'Allemands et des cyclistes. En particulier un Italien qui doit avoir dans les soixante dix ans passés. Arrive aussi une grande, vraiment très grande, Hollandaise, manifestement folle de joie. Première chose dès qu'elle descend de son vélo, elle dégaine son portable et elle se lance avec un enthousiasme évident dans la narration de son exploit, et c'est est un. Nous discutons avec les uns et les autres, de vélo et de motos. À ce col de toute évidence il y du plaisir de s'y trouver. Nous passons une soirée sympathique au refuge, qui n'est toujours pas surpeuplé, après-demain soir ce ne sera plus le cas, ils attendent 78 personnes.

 

Le matin lever pas trop matinal. Nous laissons la voiture au col Oisans Queyras 2009 125.jpgAgnel et prenons la direction d'un petit sommet dans le prolongement du Pain de Sucre. Il s 'agit d'une belle arête en calcaire de trois cents mètres. Une marche d'approche d'une bonne heure sur neige dure nous mène au départ de la voie. La première longueur est la plus difficile, six A+. A froid il faut vraiment se défoncer, et ça fait mal. Par la suite, l'escalade devient plus facile. L'adhérence de ce rocher est très importante. Alors que nous sommes en plein milieu de la voie, nous croisons en pleine paroi un bouquetin. Cela paraît Oisans Queyras 2009 149.jpginvraisemblable que ces animaux soient capables de se déplacer sur des terrains de cette raideur, et comme toujours dans ces moments exceptionnels, j'ai des petits problèmes techniques et ne peux prendre qu'une seule photo. Nous poursuivons notre montée et arrivons sur la vire où nous l'avons vu démarrer. Il paraît tout à fait impossible qu'il ait pu venir de plus haut. En effet tout est vertical voir surplombant. Même la traversée conduisant vers la droite à un pan incliné me semble impossible à franchir. D'où venait-il? Nous terminons cette arête par de magnifiques dalles très raides mais fournies en petites prises sur lesquelles on se hisse à la force des doigts. Encore une belle matinée d'effort où nous sommes seuls. C'est un grand plaisir. L'escalade est un sport qui lorsqu'on l'a aimé, toute sa vie on l'a dans la peau. Je retrouve exactement les sensations et les émotions que j'éprouvais à dix huit ans. On pourrait penser que l'expérience et la pratique entraînent une diminution du plaisir, eh bien il n'en est rien. Il faut dire que ces ascensions à trois avec des personnes que l'on apprécie, avec lesquelles tout se passe dans le calme et la sérénité sont un véritable bain de jouvence. Nous prenons le temps de casser la croûte et nous redescendons au col à travers de grands champs de neige.

 

La soirée au refuge est très agréable. Nous dînons avec deux couples et la discussion est animée. Il faut dire que le vin n'est pas mauvais, cependant nous n'en abusons pas.

 

Déjà le dernier jour, comme cette semaine passe vite. La voie de ce jour se trouve dans un coin désert, le Rognon, gros rocher caché sur la crête de la vallée qui donne sur Saint Veran, le fameux plus haut village d'Europe. L'itinéraire d'accès nous conduit d'abord au col de Chamoussière. Cela me rappelle de vieux souvenirs d'il y a trente ans et plus. Après une marche à flanc nous atteignons le pied de notre itinéraire. Que cet endroit est austère. Le rocher est un granit sans grain donc glissant, de couleur sombre, très raide et sans prises franches et pour couronner le tout le lichen règne en maître. La nuit dernière il a beaucoup plu, de ce fait les lichens sont gorgés d'eau. L'escalade s'avère délicate et très athlétique. Il faut vraiment se défoncer pour avancer et sans vergogne Robert et moi nous jetons sans état d'âme sur les mousquetons mis en place par Oisans Queyras 2009 233.jpgChristophe. L'escalade est très différente de ce que nous avons connu les jours précédents. C'est cela aussi le charme de ce sport, d'un massif à l'autre le rocher n'est pas le même et, les sensations et les efforts différents, jusqu'au toucher du rocher qui entraîne des réactions différentes. Un joli granit à gros grains ou un calcaire adhérent à prises franches, on les prend à pleines mains de façon sensuelle, par contre ce rocher froid et fuyant qui donne le strict minimum sans chercher à retenir la peau des doigts, nécessite de gros efforts et c'est presque à contre-cœur qu'on y exerce des pressions indirectes en opposition pour essayer de ne pas glisser. Le sommet est atteint. Christophe décide malgré notre peu d'enthousiasme d'aller encore escalader un magnifique doigt rocheux. L'escalade est de toute beauté, certes très difficile, mais le rocher se montre beaucoup plus franc. C'est donc sur cette magnifique petite aiguille de cinquante mètres que notre semaine d'escalade arrive à son terme. Nous repartirons la tête pleine de Oisans Queyras 2009 241.jpgmerveilleuses images en attendant les prochaines escapades. Est-ce que à plus cinquante ans on est trop vieux pour aller faire la face nord-ouest d'Ailfroide, magnifique face sombre qui s'élève sur plus de mille mètres et qui est cotée extrêmement difficile. Peut-être faut -il que nous nous entraînions, on ne sait jamais?